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Observatoire Chrétien de l'Entreprise et de la Société

L'OCHRES exerce une mission d'observation des problèmes économiques et sociaux, particulièrement de ceux qui relèvent des interactions entre l'entreprise et la société.

 
 
 
 
 
 
 

Rencontre-débat du 11 février 2023

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L’Ochres a organisé le samedi 11 février, dans la crypte de Saint-Pierre du Gros-Caillou, une matinée de témoignages sur le thème :

De conservateurs à progressistes, pour un témoignage commun de tous les catholiques.

 

Intervenants :

- Michel Camdessus,

- Philippe d’Iribarne,

- Isabelle de Gaulmyn,

- Nicolas Truelle,

- Arnaud Bouthéon

- Hervé l’Huillier.

 

Cette matinée a rassemblé un peu plus de quatre-vingts personnes. Elle a donné lieu à un compte rendu, téléchargeable à la fin de cette page .

L’exercice qui suit consiste à tirer les enseignements de cette matinée, qu’il s’agisse de points d’attention, de réflexions à approfondir ou encore de pistes concrètes.

 

  • Modérer l’affirmation des différences, crispations, radicalisations, intolérances, …

Quand l’Église montre le spectacle d’affrontements internes, parfois violents, elle se préjudicie gravement. Sans doute le spectacle d’antagonismes meurtriers est-il récurrent dans son histoire, mais aujourd’hui on pourrait désirer que l’Église soit plutôt une maison où les sensibilités différentes, même tranchées, aient droit de cité sans acerbité.

  • L’Église est influencée par la société dans laquelle elle est appelée à témoigner

L’Église ne peut échapper totalement à certains traits de notre société, comme l’affirmation ostentatoire des différences, la violence verbale, les comportements agressifs sur les « réseaux sociaux », le service immédiat de soi que favorise la propagande consommatrice, … Mais nous pouvons aussi nous manifester pour que les chrétiens se distinguent par une offre séduisante inverse faite d’accueil, de respect, de recherche commune des solutions aux problèmes les plus urgents de notre société, dans une « confrontation bienveillante ».

  • Comment dans l’opinion rendre compte des différences de manière équilibrée ?

Le traitement médiatique de la diversité des sensibilités est un défi. La Croix se soucie de trouver un équilibre entre l’expression de la diversité des visages de l’Église, les réactions des lecteurs, les prises de position du journal, … Il est possible que, dans les médias, l’Église apparaisse plus divisée qu’elle ne l’est en réalité, le phénomène de « minorité silencieuse » jouant son rôle. Néanmoins, certaines sensibilités cherchent dans les médias une caisse de résonance parce qu’elles se considèrent peu entendues : c’est l’Église tout entière, chaque membre du « corps » avec ses responsabilités propres, et en particulier les laïcs, qui est appelée à une sagesse capable d’absorber les différences, avant que les frustrations ne conduisent chaque sensibilité à batailler en son sein pour la faire pencher de son côté.

  • La radicalisation des jeunes générations est préoccupante

Dans le contexte quelque peu déboussolé de notre société (« brebis sans berger »), l’Église n’échappe pas à l’exigence passionnée de représentants des jeunes générations. N’a-t-elle pas contribué à institutionnaliser le fossé entre jeunes et moins jeunes ? Même s’il est nécessaire que la jeunesse se saisisse du monde avec ses codes et ses rêves, néanmoins, il semble qu’il est grand temps de retrouver les conditions d’un dialogue intergénérationnel fructueux, dans lequel aucune génération ne dicte à l’autre ses certitudes, mais qui leur permette de se reconnaître sur l’essentiel, en s’inspirant de la recommandation de Don Bosco : "Aimons ce qu’ils aiment et ils aimeront ce qui nous plaît ».

 

  • Développer des instances de dialogue et de « ravitaillement »
    • Nous avons besoin de lieux de rencontre

La rencontre annuelle à Lourdes organisée par les Apprentis d’Auteuil, le Congrès Mission, … répondent à un besoin d’initiatives permettant la rencontre et le « ravitaillement » de fidèles de sensibilités diverses ou plus ou moins proches de l’Église, favorisant la découverte des autres, l’échange des bonnes sources, la communication réciproque des solutions, … Il y a certainement des initiatives à inventer ou diffuser plus largement, adaptées à des échelons structurels ou géographiques divers, où l’on puisse « partager l’odeur des brebis », selon le mot de saint François de Sales.

  • La paroisse est par excellence un endroit de « rencontre et de ravitaillement »

Les paroisses rurales ou des zones en apparence déchristianisées semblent essoufflées ; en ville, malgré les différences sociologiques, grâce à la proximité et aux moyens humains, elles paraissent plus allantes. Par des initiatives favorisant la fraternité, la découverte mutuelle de la parole de Dieu, le service des personnes fragilisées, la paroisse – et ses relais - garde visibilité et légitimité pour faire progresser la rencontre de ses habitants, l’estime réciproque dans la diversité, le désir et des idées pour faire communauté.

  • Travailler la thématique de l’unité dans l’Église et devenir prophétique

On voit que le besoin d’unité se fait sentir dans de nombreuses structures de la société (entreprises, partis, syndicats, …) qui souffrent toutes des divisions ou des affrontements internes. L’Église pourrait rendre service à la société en développant une « culture de l’unité ». L’unité donne son sens à la fraternité et constitue un signe pour l’annonce de l’Évangile, … Nous devons être mieux instruits pour comprendre que l’unité n’est pas une option facultative et comment la recherche de la communion dans le faire-valoir des différences peut inspirer nos sociétés morcelées à l’extrême.

 

  • Travailler ensemble : « c’est la mission qui unifie »
    • S’engager sur des services concrets

Comme le reste de la société, l’Église voit se développer en son sein des sous-populations qui s’organisent autour de polarités spécifiques où l’entre-soi est privilégié. Lorsque ces groupes s’expriment sur les évolutions dans l’Église ou du monde, ils sont souvent éloignés d’une partie des réalités, car ils perçoivent de façon indirecte et fragmentaire les autres groupes. En fait, c’est l’engagement concret dans les services de l’Église - en particulier dans la paroisse - ou de la cité - en particulier dans les milieux peu irrigués par la présence chrétienne - qui donne une idée juste de ces réalités, des réalisations comme des attentes non satisfaites.

  • Le travail en commun favorise la mise au second plan des divergences

Le travail de l’Église et dans l’Église est un projet pluriel et permanent qui vise à construire ou améliorer à la fois « la tente de la rencontre » et la « maison de la miséricorde ». Cette perspective permet de faire vivre à la bonne place les différences de sensibilités dans des projets concrets où sont prioritaires la mission – qui fixe le quoi, le pour quoi et le comment -, l’équipe – qui crée la confiance mutuelle -, la personne de l’autre – devant laquelle la promotion de soi n’a pas sa place -.

 

  • Développer la formation : les divisions viennent souvent de réductions simplistes
    • La formation est devenue indispensable

Nous constatons un déficit de formation qui conduit à des interprétations partiales de l’Évangile, de Vatican II, de la doctrine sociale de l’Église, des textes du magistère, … Cette situation peut expliquer non seulement des conflits d’adaptation sur les différents terrains, mais aussi des freins dans la transmission de la foi et le témoignage évangélique. L’enseignement de l’Église est devenu beaucoup plus abordable grâce aux outils qui permettent de s’affranchir de la distance et du temps (Moocs, podcasts, …) : se réunir ensemble dans des cadres appropriés pour se mettre à niveau est sans doute une piste sous-exploitée à ce jour.

 

  • Favoriser la formation à l’écoute et à la médiation

Comme la société, l’Église se divise aussi sur des facteurs compréhensibles : sociologie des territoires, priorités, théorie et pratique, perceptions de la justice, … La formation théorique y remédie peu. La promotion de témoins plutôt que de maîtres peut apporter des réponses. En fait, compte tenu de ce qui les anime, les chrétiens peuvent apporter aussi le service de l’écoute et de la médiation, qui contribue à la réconciliation. Proposer un esprit et un savoir-faire de médiateur, c’est par exemple favoriser les vocations de délégués de classes écoutés et tournants, des formations d’arbitres dans le sport scolaire et universitaire, de prudhommes et de juges à l’amiable, de conseillers formés pour la résolution des conflits, …, un ensemble de pistes existantes ou à créer : comment y contribuer hardiment ?

 

  • Redéployer l’Église
    • Une Église de moins en moins diverse ?

Nous nous inquiétons d’une Église atteinte par ses divisions internes. Pendant ce temps-là, nous ne voyons pas assez notre Église se rétrécir progressivement à des milieux de plus en plus homogènes et ne plus rejoindre des pans entiers de notre société (milieux socio-professionnels, catégories d’âges, répartition géographique, …). En d’autres termes, occupés par nos dissensions, ne nous trompons-nous pas de priorité ? La diversité de nos sensibilités pourrait au contraire nous permettre de parler à des populations diverses avec des mots et par des témoignages plus ajustés.  

  • Être prudent à propos de ce qui semble marcher aujourd’hui

Comme le reste de la société, l’Église a vécu ces derniers temps une période douloureuse qui a entraîné un doute sur la fiabilité de ses cadres. Elle a fait un examen de conscience qui a pu être considéré comme prophétique, car indicatif pour toute la société. Dans cet examen, la question de l’homme providentiel, des fondations qui séduisent et deviennent exemplaires, d’une forme de mondanité, a été posée. Les divisions peuvent aussi venir d’un attachement à des personnes emblématiques, des méthodes performantes, des fraternités attractives. Il ne devrait y avoir qu’un seul modèle, le Christ, qu’une seule méthode, le don de soi, qu’une seule fraternité, l’Église : « Personne ne peut faire le malin ».

  • Construire la synodalité

La synodalité engagée par le pape François est une opportunité. L’Église a besoin de se rééquiper pour répondre aux attentes, parfois inapparentes, du monde. Clercs épuisés, laïcs sous-formés, ambitions inappropriées, décalages entre le dire et le faire, … il y a beaucoup à remmailler, et les querelles de chapelles ont quelque chose d’indécent. La barque a besoin de mains nombreuses et différentes, d’équipes de bâbord et d’équipes de tribord, … ; mais aussi, au-delà de la catégorisation des personnes, c’est sans doute sur la manière de les relier qu’il y a un chantier : proximité, concrétisation, confiance, complémentarité, groupage, service mutuel, …

 

  • Travailler avec les responsables publics

Les Apprentis d’Auteuil sont une « Fondation catholique reconnue d’utilité publique ». Cela montre qu’il y a une voie possible pour des coopérations avec les responsables publics, trop souvent vus dans l’Église comme des opposants. L’Église a beaucoup à gagner d’une implication dans les services publics, notamment ceux qui sont proches du terrain. Elle peut ainsi contribuer à une société plus liée, peut-être plus ambitieuse pour la personne humaine, et témoigner sans fard de ce qui la fait vivre.

 

 

Observatoire chrétien de l’entreprise et de la société – www.ochres.org

 

Pour télécharger le compte-rendu de cette réunion, cliquez ICI

 

 

 
Dernière modification : 10/03/2023